Ta délivrance, ma souffrance - ÉPILOGUE

 

   

31. Stop Crying Your Heart Out

Novembre

Aujourd’hui, en ce premier du mois, ça fait exactement un an que Mathias s’est suicidé. Je dois dire que je ne me sens pas particulièrement bouleversée par cet anniversaire. Cette journée me replonge tout de même dans de rudes souvenirs. Il y a un an, je tombais dans un gouffre profond de détresse. Avec le recul, je réalise que le suicide de Mathias m’a fait tombée assez bas. Mais j’ai remonté depuis.

En novembre dernier, la mère de Mathias m’avait dit de parler si j’allais mal, de ne pas tout garder pour moi. Son conseil m’était complètement sorti de la tête. J’ai fait exactement le contraire. Sauf à partir du moment où j’ai décidé de consulter.

Je pense qu’être allée voir Agathe a été la meilleure décision que j’ai prise. À ce jour, je continue de la voir toutes les semaines. Je fais beaucoup de chemin avec elle. J’apprends tranquillement à laisser aller ma vulnérabilité.

Ma relation avec ma mère s’est grandement améliorée depuis notre soirée à cœurs ouverts. Ce moment nous a en quelque sorte fait comprendre que nous avions le droit de s’ouvrir l’une à l’autre. Avoir pleuré dans ses bras, de m’être montrée à ce point vulnérable devant elle a permis de briser toutes les barrières.

Je vais mieux à présent même si je ne me suis pas complètement remise de cette année tourmentée. Par exemple, la pendaison est toujours un sujet qui génère de l’anxiété chez moi. J’espère qu’avec le temps, ce malaise qu’elle me fait ressentir finira par se dissiper. Pour l’instant, je suis obligée de fermer les yeux si j’en vois dans les films ou de sauter des lignes si c’est décrit dans un livre. Mais j’arrive à vivre avec ça.

J’ai vu mon père cet été. Sa maison était plus accueillante. Il avait enfin pris le temps de s'installer parfaitement. Il n’y avait plus de boîtes partout dans sa chambre d’ami. J’ai passé plusieurs jours à Québec avec lui et ça m'a fait beaucoup de bien. On a énormément discuté tous les deux. 

Je vois toujours Flavie quotidiennement. On covoiture ensemble pour aller au cégep. Avec ces balades en auto, on a beaucoup de temps pour parler ce qui fait que nous devenons de plus en plus proches.

Depuis maintenant deux mois, je suis mes cours de sciences humaines. J’aime bien ce programme. J'adore particulièrement le cours de psychologie, surtout le volet psychanalyse. J’aimerais éventuellement me pencher davantage sur la personnalité dépressive. J’ai comme objectif de comprendre les fondements de la dépression. Ça me permettra de mieux comprendre Mathias, mais aussi ceux qui sont comme lui. J’aimerais lutter contre cette maladie destructrice.

J’ignore si je vais continuer dans ce programme. Je me mets sérieusement à envisager la technique de thanatologie. Il me faudrait cependant aller étudier à Montréal. Je ne crois pas être prête à aller aussi loin pour les études. Je prends le temps d’y réfléchir. Pour l’instant, je continue les sciences humaines et ça me convient. Puis, j’ai toujours mon travail chez Edgar Lavoie que j’apprécie énormément.

J’ai d’ailleurs passé une journée de travail complète avec mes collègues. Ils ont tous pris le temps de me montrer les sphères de leur métier. Je suis allée à la morgue avec Jérôme, Annick m’a fait visiter le crématorium et le columbarium, et Maxence m’a montré comment on embaume un corps. Cette journée était des plus passionnantes. J'ai même eu le droit à une balade en corbillard malgré que ce soit interdit. Seulement pour me faire plaisir, Annick a décidé d’être mon chauffeur en cachette, le temps de quelques minutes.

Le souvenir de Mathias résonne toujours en moi. Je pense encore souvent à lui. Parfois, je deviens triste mais d’autres fois, mes souvenirs me rendent heureuse. Agathe m’a assuré que c’était normal que je me sente encore à l’envers parfois. Que peut-être même toute ma vie j’aurai des rechutes de mon deuil si je peux dire.

Je sais que rien ne sera comme avant. Connaître quelqu’un qui s’est suicidé, ça nous change. Je ne suis plus la Sarah d’avant le suicide de Mathias. C’est un fait. Cet événement a changé ma conception du monde. Mais ça va. Je vis avec. La vie continue. Ça m’a transformée mais sur bien des points, pour le mieux. Je me sens plus ouverte d'esprit qu’avant, et plus forte même.

Avec le temps, je réalise que je suis en vie et c’est tout ce qui compte. Je profite des plaisirs simples. Je vis tout simplement dans le but de me sentir bien. Mathias n’a pas su comment faire mais moi je saurai. Il y a trop à vivre, trop à découvrir, tellement d’endroits à voir dans le monde, tellement de projets à réaliser que si je pouvais, je prendrais plusieurs vies pour goûter à tout.        

Même si je peux me réveiller en plein milieu de la nuit, trop tôt le matin suite à une nuit mouvementée ou en sursaut suite à un cauchemar, je continue encore de me réveiller. C’est l’important.         

La vie ne fait que commencer et je compte bien la savourer.









Playlist

1. Paralyzed, NF
2. Un jour dans notre vie, Indochine
3. Smells Like Teen Spirit, Nirvana
4. November, Juli
5. How To Save a Life, The Fray
6. What If, Kate Winslet
7. Bright Eyes, Art Garfunkel
8. Just a Little Girl, Trading Yesterday
9. Little Dolls, Indochine
10. White Blank Page, Mumford and Sons
11. So Cold, Ben Cocks
12. Electrastar, Indochine
13. Welcome To My Life, Simple Plan
14. I’m Just a Kid, Simple Plan
15. Crawling, Linkin Park
16. One Step Closer, Linkin Park
17. Boulevard Of Broken Dreams, Green Day
18. Till It Happens To You, Lady Gaga
19. Breaking The Habit, Linkin Park
20. J’ai demandé à la lune, Indochine
21. Astronaute, Simple Plan
22. House On Fire, Sia
23. Trauma, NF
24. Tornado, Jonsi
25. My Body is a Cage, Peter Gabriel
26. Lithium, Nirvana
27. Welcome To The Black Parade, My Chemical Romance
28. Gone To Soon, Simple Plan
29. Leaves Out All The Rest, Linkin Park
30. Pink Water, Indochine
31. Stop Crying Your Heart Out, Oasis