Critique : #SansTabou 2 Coming in
Titre : #SansTabou 2 Coming In
Auteur : Samuel Champagne
Édition : de Mortagne
Résumé :
1 roman, 5 histoires. On parle souvent de coming out, mais presque jamais de coming in. Pourtant, avant de pouvoir sortir du placard, on doit déjà y être entré, non? Pour annoncer au monde qui on est et qui on aime, on doit d'abord l'avoir réalisé. Il y a autant de manières de prendre conscience de son orientation sexuelle qu'il existe de personnes homosexuelles ou bisexuelles. Ce livre contient le coming in de Zachary, Adriana, Jesse, Maxine et William, cinq adolescents complètement différents. Chacun leur tour, ils racontent leur histoire sans détour..
Avis :
J’ai immédiatement sauté sur ce livre car j’ai vraiment été interpellé par le sujet. Il est vrai qu’on ne parle pas assez de coming in, qui est pourtant une étape très importante. En lisant la quatrième de couverture, j’ai moi même pensé à mon propre coming in. J’ai découvert ma bisexualité à l’âge de quinze ans en tombant amoureuse d’une fille dans une série. Au fil de ma lecture de #SansTabou 2, j’étais quand même un peu triste de découvrir qu’aucune des cinq histoires montrait un coming in comme le mien.
Enfin bref, qu’est-ce que vaut ce livre même si les personnages n’ont pas eu de coming in aussi plate que le mien? Il est bien. Ce n’est pas la lecture la plus extraordinaire que j’ai lu de ma vie, mais elle fait franchement bien le travail. Son objectif est atteint. Les histoires sont assez diversifiées, on nous montre différents coming in. Je crois que ma préférée est celle de Maxine. Une petite tomboy qui en a assez de se faire dire qu’elle est lesbienne simplement car elle n’entre pas dans les standards féminins. J’aime son style, ses revendications… Je la trouve cool. Elle est un beau personnage. Un détail par contre qui m’a vraiment énervé chez elle, c’est qu’elle finit beaucoup trop de phrases par « hein? ».
« qu’est-ce qu’ils diraient, hein? » (p. 173)
« Quel président ou premier ministre a décidé que ça devait être comme ça, hein? » (p. 178)
« qu’est-ce que ça veut dire, hein? » (p. 179)
« C’est ça qu’ils pensent, hein? » (p. 181)
Et il y en a plein d’autres. Ça m’agaçait. C’est un personnage qui revendique beaucoup, et la formulation de ces phrases le prouve bien, mais c’était énervant à force de trop en avoir. Mais sinon, comme je l’ai dit, son côté revendicatrice est très charmant et compréhensif.
Je pense que l’histoire que j’ai moins aimé c’est la première, celle de Zachary. Elle est bien, mais c’était un peu cliché. Le gars sportif populaire qui ne veut pas briser son image de sportif viril parce que sinon il tomberait dans la catégorie des loosers. Je n’ai pas lu le roman James du même auteur, mais je crois que le sujet est sensiblement le même. Un sportif perturbé par sa bisexualité parce que ça ne fait pas assez viril. En plus que le livre apparaît dans le segment. Je ne sais pas trop quoi penser de ce clin d’oeil. Mais j’ai tout de même pris plaisir à suivre le parcours de Zachary. Ce n’est pas l’histoire dans laquelle je me suis sentie le plus investie, mais je ne me suis pas ennuyée une seconde. C’était bien écrit.
L’histoire d’Adriana aborde la religion. J’ai trouvé que c’était une bonne idée. Car même si les familles très religieuses sont plutôt rares aujourd’hui, elles existent encore et c’était une bonne idée de le montrer dans ce livre. Ça peut jouer sur la manière dont un jeune vit son orientation sexuelle. C’est ce qu’on voit à travers le personnage d’Adriana. Il y a seulement un aspect qui m’a agacé dans ce segment, c’est Anouk qui dit sans arrêt « S’ils savaient ». En tant que lecteur, on comprend très bien qu’elle fait allusion à son homosexualité. À chaque fois qu’elle le dit, elle s’arrange pour changer de sujet. Même quand Adriana tente de comprendre ce qui se cache derrière ce « s’ils savaient », Anouk ignore ses interrogations. À ces passages, je voyais juste une fille cherchant à faire son intéressante et sa victime. Si tu ne veux pas révéler ton secret, lance pas des brèches comme ça. Les gens qui se mettent à parler de quelque chose pour ensuite dire qu’ils ne veulent pas en parler, ça a le don de m’énerver. C’est un élément qui ne m’a pas aidé à apprécier ce personnage, malheureusement. Mais le reste de l’histoire d’Adriana, je l’ai bien aimé. J’aime que la découverte de son orientation sexuelle se déroule sur quelques années. Comme elle, j’ai aussi pensé être hétéro avant de comprendre que j’étais bi.
J’ai été attendri par la douceur et la sensibilité de Jesse. Ce qui m’a particulièrement accroché dans son segment c’est son lien avec sa cousine Émilie. J’ai un gros faible pour les relations entre cousins/cousines. Elle est sa seule amie et elle est encore au primaire. J’ai trouvé ça trop cute. C’est tellement vrai que les différences d’âges paraissent si grandes à l’adolescence alors qu’il y a seulement deux ans qui séparent les personnages. Ça m’a fait penser à ma cousine dont j’ai toujours été très proche et qui a deux ans de plus que moi. Quand elle était en secondaire deux, j’étais encore au primaire. Exactement comme Jesse et Émilie.
Le segment de William est vraiment cool. J’ai un petit coup de coeur pour les histoires qui se déroulent en seulement une journée. J’en parle dans ma critique du film Superbad. Ça crée une belle dynamique. Réussir à tout mettre en seulement quelques heures, j’admire ça. Et puis un point que j’adore de ce segment ; il n’y a pas de romance. On est pas toujours obligé de découvrir son orientation sexuelle avec un futur amoureux. C’est même rare dans la vraie vie, alors ça fait du bien de lire l’histoire d’un gars qui réalise simplement qu’il ressent de l’attirance pour des gars et des filles sans que ça aille plus loin.
Au début, je craignais que toutes les histoires abordent l’homosexualité ou la bisexualité comme si on était encore dans les années 1980. Comme si c’était quelque chose de gros, limite épouvantable. Rendu en 2022 en occident, le coming out en lui-même commence à devenir en voie d’extinction. Bien sûr, pour certaines personnes, ça peut être plus délicat. Mais pour la majorité des gens, ça ne devrait pas être une grosse affaire. Dans le cas d’Adriana, par exemple, oui c’est plus difficile considérant sa famille religieuse, mais son histoire est loin d’être mélodramatique.
Ça fait du bien de lire sur un sujet dont on parle très peu. Chaque personnage a son identité et son environnement propre à lui. On peut s’identifier un peu à un ou à un autre. Une lecture légère qui se lit bien, tout en étant très pertinente.
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