Critique : Monsieur Lazhar

 

Titre : Monsieur Lazhar 

Réalisateur : Philippe Falardeau 

Résumé : 

À Montréal, une enseignante du primaire meurt soudainement. Bachir Lazhar, un immigrant algérien, est rapidement embauché pour la remplacer alors qu'il nage lui-même en pleine tragédie personnelle.

Avis :

Le film débute un matin d'hiver, dans une école primaire. Simon, un élève de l'école, découvre sa professeure pendue dans la classe. En entrée de jeu, le film nous plonge dans le drame principal, et ce, très efficacement.

Je tiens avant tout à dire que j'ai d'abord vu ce film quelques mois après sa sortie, en 2011. Je dois avouer qu'en tant que jeune de douze ans, j'avais été profondément marqué par ce film et particulièrement par cette scène car, quelques mois plus tôt, j'avais perdue ma cousine par pendaison. Je ne crois pas que j'étais prête à ce moment-là, à m'embarquer dans un tel film. D'autant plus que ça m'avait pris par surprise. Je n'avais pas pris connaissance du synopsis avant de commencer mon visionnement. J'ai donc un peu repoussé ce film dans mon estime. Mais aujourd'hui, avec mon regard d'adulte et mes démons dorénavant maîtrisés, j'ai pu apprécier ce film avec un regard moins biaisé par mes émotions à vif. Bien sûr, je reste marquée par mon drame personnel et il a tout de même jouer sur mon appréciation du film. Il m'a aidé à me sentir investi dans l'histoire. 

Enfin, la scène où Simon trouve sa professeure est vraiment excellente. Les événements s'enchaînent dans un plan sans coupure, ce qui amène un réalisme à la scène. Elle nous donne l'impression d'être réellement présent, en train d’observer ce qui se passe.

Tout d'abord, dans ce film, j'y ai vu une certaine critique des écoles primaires. Bachir Lazhar tient le rôle du personnage qui vient apporter une nouvelle vision. Vision pas toujours la bienvenue pour le personnel enseignant ainsi que pour la directrice. Par contre, le film ne représente pas Bachir comme un professeur révolutionnaire et parfait, qui n'a rien à se reprocher et dont l'école devrait changer sa vision des choses pour complètement adhérer à celle du nouveau professeur. J'ai apprécié que le film apporte des nuances. Il n'y a pas un camp avec des opinions soi-disant « parfaites » et un autre camps à bannir. Le film présente diverses opinions venant de différents professeurs, parents, directeurs, etc. C'est au spectateur de faire ses propres réflexions devant ces opinions. Même si, majoritairement, c'est l'école qui est plus dans le tort.

On sent que l'école a beaucoup de difficulté à gérer le drame qui la touche et préfère donc faire silence sur la tragédie. Monsieur Lazhar est un film qui dénonce les silences au sain d'un drame, particulièrement lorsque ce dernier touche des enfants. Ça se voit dans divers moments, par exemple, celui où Alice fait mention du suicide de sa professeure dans sa présentation orale. Bachir trouve son texte très poignant et surtout vrai. Il demande donc à la direction si c'est possible de diffuser le texte. La directrice refuse sous prétexte que c'est trop violent et que le texte pourrait perturber les élèves. 

On le voit un peu aussi à travers le comportement de Simon. Ce dernier possède une photo de sa professeure où il lui a dessiné des ailes d'anges et un nœud coulant autour de son cou. Les professeurs ainsi qu'Alice le trouvent tordu d'avoir fait un tel geste. Moi, j'y ai vu un moyen maladroit d'exprimer ses émotions. C'est profondément venu me chercher. J'ai trouvé que ça représentait bien les conséquences qui peuvent surgir lorsqu'un enfant vit un traumatisme sans vraiment avoir la possibilité de le vivre ouvertement. Simon avait besoin de s'exprimer, de vivre son deuil et sur le coup, c'est le seul moyen qu'il a trouvé pour extérioriser ses émotions. C'était d’ailleurs un peu mon genre de commettre des gestes dans ce style. Comme Simon, j'ai vécu un deuil traumatique dans le silence, alors je le comprends tout à fait d'avoir fait de tels dessins.

Ma scène préférée est celle où les élèves discutent enfin du suicide de Martine avec Bachir. Pour cet homme, il est important que les élèves puissent en parler ouvertement et dans cette scène, il leur donne enfin l’occasion. J'ai particulièrement aimé lorsqu'il a clairement demandé si d'autres personnes voulaient en parler. Il les encourageait à s'exprimer. Dans cette scène, Simon finit par fondre en larme et déverse tout ce qu'il a sur le cœur. J'ai été frappée par la détresse de ce jeune. Et prenons le temps de féliciter l'acteur, Émilien Néron, pour son jeu. 

Sophie Nélisse est également excellente. Je me suis d’ailleurs reconnue dans son personnage. La jeune Alice est l'élève mature qui aime son école et ses professeurs. J'ai été touchée par la tendresse et l’intérêt qu'elle accorde à son nouveau professeur. Ce personnage est toutefois un brin miss parfaite et moralisatrice, ce qui m'a agacé un peu mais ce n'est pas accablant. Elle peut aussi se montrer dure parfois avec Simon mais son attitude est compréhensive puisque Simon a des comportements répréhensifs. Par exemple, il a agit injustement envers sa professeure à l’époque où elle était vivante et bien entendu, Alice lui en veut pour ça. Mais dans la scène où Simon s’ouvre le cœur, on comprend ce qui l’a poussé à agir de la sorte et ça permet de mieux le comprendre et ainsi, le rendre encore plus touchant. 

Je crois que pour apprécier ce film, il faut d’abord aimer les ambiances scolaires car presque toutes les scènes se déroulent à l’école. Personnellement, c’est un facteur qui m’a accroché. J’aime les histoires qui se passent à l’école primaire. Ce film m'a rappelé ma cinquième et ma sixième année. 

Monsieur Lazhar est un film qui aborde des sujets lourds et importants mais qui arrive à raconter son histoire avec une belle tendresse. Il critique les lacunes que l’on peut retrouver dans les écoles. Il y amène plusieurs réflexions pertinentes, autant sur l’école que sur le deuil chez les enfants. Il vaut le coup d’œil si on aime les films avec des personnages d’enfants touchants et réalistes, et que la thématique du deuil nous parle. 

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