Sans trace - CHAPITRE 18
Chapitre 18
Mardi 14 octobre
C’est un matin sombre. Les nuages sont pleins et lourds mais aucune pluie ne tombe. Maverick et moi sommes les premiers à nous lever. Notre routine matinale se fait en automate. Nous déjeunons sans échanger une seule ligne de dialogue.
Nos matinées ont déjà été bien moins moroses que ça. Daniel et moi avions l’habitude de nous agacer et on le faisait même le matin. Le printemps passé, alors que je déjeunais tranquillement, Daniel avait décidé de me lancer une cheerios. Ne m’y attendant pas du tout, j’en ai sursauté. Il me provoquait du regard. Le sourire en coin, je lui en ai lancé une à mon tour. Il a répliqué, j’ai fait de même, et ainsi de suite jusqu’à ce qu’on soit morts de rire. Maverick paniquait à nous voir aller, ce qui augmentait notre plaisir.
- Franchement arrêtez ça! Vous n 'êtes pas des enfants!
- Ben oui, on est des enfants, lui avait renvoyé Daniel.
- Ramassez ça, je ne le ferai pas à votre place.
Il a finalement tout ramassé, ne nous donnant pas le temps de le faire. Maverick avait l’air de nous détester ce matin-là, mais nous savions qu’il nous aimerait peu importe les niaiseries qu’on ferait.
Je regarde Maverick déjeuner avec son regard triste à moitié endormi. J’aurais envie de lui lancer une cheerios pour lui arracher un sourire mais le connaissant, ça risquerait de le mettre en rogne plus qu’autre chose. Alors, je me résigne. Si Daniel était là, je ne me serais pas gênée.
Notre routine se poursuit de façon machinale. Mon frère se brosse les dents pendant que je m’attache les cheveux. Je fais mon lit, il prend sa douche. On se croise dans le corridor ; je vais à la salle de bain alors qu’il retourne à sa chambre pour finir de se préparer.
Chacun le sac sur le dos, nous descendons les escaliers. Au moment où je m’apprête à enfiler mes souliers, ma mère débarque dans l’entrée, les yeux encore endormis.
- Vous savez, vous n’êtes pas obligés d’aller à l’école. Liz, si tu veux, je peux motiver ton absence.
- C’est correct maman, rassure Maverick. Je préfère y aller, ça va me faire du bien.
Notre mère hoche la tête.
Sa proposition me fait réaliser que je n’ai pas envie d’affronter l’école. Je suis trop fatiguée. Fatiguée d’être constamment dans la peur et dans l'incertitude. Fatiguée d’imaginer toutes sortes de scénarios sur Daniel. Fatiguée de me remémorer la soirée de la disparition sous tous ces angles et détails. Fatiguée de me sentir coupable. Fatiguée d'attendre après la police. Fatiguée d’être inquiète. Fatiguée d’être déprimée.
Sans dire un mot, je détache ma queue de cheval et remonte dans ma chambre. Je laisse tomber mon sac à dos par terre et m’échoue à plat ventre sur mon lit fraîchement fait.
Après quelques minutes passées sans bouger, j’entends cogner à ma porte. Je tourne ma tête toujours écrasée sur mon oreiller. Ma mère me regarde tendrement.
- Ça me rassure de te savoir à la maison.
Elle a peur que je disparaisse aussi? Elle va encore me sortir son discours « Ne sors pas, c’est dangereux »? Elle s’avance vers moi.
- Tu n’as pas beaucoup pris de temps pour toi depuis ce qui est arrivé, explique-t-elle en s'asseyant sur mon lit. Tu as vite repris les cours. Ça me fait du bien de savoir que tu te reposes ici aujourd’hui.
- Je suis fatiguée, soufflé-je.
- Je comprends, poussin. Moi aussi je le suis.
Elle me caresse les cheveux.
- On pourrait faire un truc sympa aujourd'hui, propose-t-elle. Juste toutes les deux.
- Qu’est-ce que tu voudrais faire?
Elle réfléchit un instant.
- Quelque chose de tout simple et d’agréable. On pourrait se payer des poké bowls pour dîner et regarder un petit film réconfortant.
Je repense à ce que Maverick m’a confié. S’il était à ma place, il serait fâché que maman lui propose ce genre de truc. J’avoue que sa manière de voir les choses commence à m’affecter. Il a peut-être raison. Suis-je égoïste parce que je veux continuer ma vie? Parce que je m’adonne à ce que j’aime? Passer du temps avec mes amis et au théâtre? Et maman dans tout ça, c’est vraiment ce qu’elle souhaite? Qu’on passe une journée agréable alors que son fils a disparu?
- Comment veux-tu qu’on prenne le temps de faire quelque chose d’agréable? Tu ne te sens pas coupable?
- J’ai deux choix, Liz. Soit je m’arrête de vivre parce que Daniel a disparu, soit j’arrive à survivre grâce aux petits plaisirs de la vie. Ce n’est pas parce que je m'accorde le droit de vivre que je néglige Daniel.
- Mais comment je peux me laisser aller aux petits plaisirs de la vie quand Daniel est peut-être mort seul quelque part à attendre qu’on retrouve son corps ou séquestré dans un sous-sol à se faire violer?
Ma voix s'est cassée au mot « violer ». Je ne comprends même pas comment j’ai pu énumérer à haute voix ces horribles possibilités devant ma mère. Cette dernière ferme les yeux. Son visage se crispe, comme si elle cherchait à chasser ces images mentales que je lui ai infligées. Je me sens mal tout à coup.
- Ma puce, je comprends totalement ce que tu ressens.
Elle tente de le cacher mais je vois bien qu’elle se retient de pleurer. J’espère que je ne l’ai pas trop blessée. Je me maudis en silence.
Je ne sais plus quoi faire. Continuer comme si de rien n’était? Me reposer? Ne rien faire du tout?
Je me sens si perdue.
- Prends ton temps poussin, me conseille maman. Reste dans ta chambre si tu veux. Je vais descendre. Si le cœur te le dit, tu viens me rejoindre.
- Okay! dis-je avant même qu’elle ait le temps de se lever. Je suis d’accord pour un poké bowl et un film.
Je lui grimace un sourire. J’essaie de rattraper ma crise de névrose. Maman veut seulement qu’on prenne soin de nous-mêmes, et c’est d’autant plus important avec ce qu’on traverse.
Je crois qu’en fait, j’ai peur de m’en vouloir si je me repose. Me plonger la tête première dans les études me permettait d'accomplir quelque chose de concret. C’était un moyen pour moi de ne pas me sentir coupable. Ou du moins, de me cacher ma culpabilité. Pour ce qui est du théâtre, oui j'adore ça, mais ça m’aide aussi à me rendre utile. M'investir dans ce projet, le monter de toute pièce, j’ai l’impression d’être réellement utile. Comme si j'étais indispensable, que ma présence était nécessaire.
Maman me sourit à son tour, puis se lève pour quitter ma chambre. Je la suis, je ne veux pas être seule aujourd’hui.
* * *
J’ai passé l’avant-midi avec ma mère au salon. On a parlé de tout et de rien. À travers nos discussions, je m’adonnais à mes devoirs et elle, aux tâches ménagères. Je crois que ça la détend. Elle a passé l’aspirateur deux fois dans la cuisine.
- Est-ce que tu commences à avoir faim? me demande maman en éteignant la machine.
- Quand même, dis-je en reposant mon cahier.
- Parfait. Moi, je meurs de faim. Tu veux venir avec moi à l’épicerie?
J’accepte son invitation. Je saute sur toutes les occasions qui me permettent de changer d’air.
- On va aller chercher notre dîner. Tu pourras aussi te choisir un dessert, ajoute-t-elle en me faisant un clin d'œil.
Choisir un dessert.
C’est ce qu’a fait Daniel juste avant de s’évaporer. J’en ai un pincement au cœur. Ma mère est aux petits soins avec moi alors que mon frère est peut-être mort ou en train de se faire torturer.
Rhaa !! J’en ai assez de penser à ça.
J’essaie de repousser ces images en acceptant la douce proposition de ma mère qui veut seulement prendre soin de sa fille.
En entrant dans l’épicerie, je réalise que c'est la première fois que j’y mets les pieds depuis le fameux soir. Tout me revient en tête. Je revois Daniel parcourir les rangées. Je nous vois attendre dans la très longue file à la caisse. Je le vois passer les grandes portes coulissantes… C’est la toute dernière fois que je l’ai vu.
Nous nous trouvons devant le comptoir à sushis qui me fait saliver.
- Pour moi ce sera un poké bowl au saumon, exprime maman en en déposant un dans le panier. Tu veux quelle sorte?
- Au thon, mais on dirait qu'il n'y en a pas.
Je cherche dans le comptoir au cas où j'aurais seulement mal vu. Mais bon, il semblerait que je dois me rabattre sur un plan B.
- Je vais demander à la fille si c’est possible qu’elle t’en fasse un.
- Ben non, maman. C’est pas grave. Je peux prendre une autre sorte.
- Excusez-moi? apostrophe-t-elle l’employée en ignorant mon intervention. Il n’y a plus de poké bowl au thon. Est-il possible d’en avoir un?
- Oui bien sûr. Je vous en fais un à l’instant.
- Merci beaucoup! Tu en veux un au thon, alors tu en auras un, me dit-elle en se tournant vers moi.
Je lui souris, touchée par sa bienveillance.
Mon bowl poké est près en moins de deux.
- Va te choisir un petit sucre à présent.
En chemin vers la rangée des bonbons et chocolats, nous croisons une femme qui connait visiblement ma mère.
- Kristelle!
- Ah! Salut Chantale.
Je n’ai jamais vu cette Chantale de ma vie. Ma mère a le don de connaître des centaines de personnes que je ne connais pas.
- Je suis contente de te voir. J’ai entendu ce qui est arrivé à ton garçon. Je suis tellement désolée. Est-ce que tu tiens le coup?
- Oui et non.
- Hésite pas à m’appeler si tu as besoin de quoi que ce soit.
- Merci Chantal. T’es vraiment gentille.
- C’est normal voyons. Prends soin de toi, dit-elle avant de quitter pour la première rangée.
Pff. Elle ne m’a même pas regardée une seconde.
- C’est qui, elle? demandé-je dédaigneusement.
- Une fille avec qui je suis allée au secondaire. Bon, allons-y.
- Laisse faire. Je n’en veux pas. On peut aller à la caisse.
Maman est sceptique devant mon refus. Elle remarque alors le congélateur à côté de nous. Sans prévenir, elle ouvre la porte et saisit un pot de sorbet.
- Ah! Salut Chantale.
Je n’ai jamais vu cette Chantale de ma vie. Ma mère a le don de connaître des centaines de personnes que je ne connais pas.
- Je suis contente de te voir. J’ai entendu ce qui est arrivé à ton garçon. Je suis tellement désolée. Est-ce que tu tiens le coup?
- Oui et non.
- Hésite pas à m’appeler si tu as besoin de quoi que ce soit.
- Merci Chantal. T’es vraiment gentille.
- C’est normal voyons. Prends soin de toi, dit-elle avant de quitter pour la première rangée.
Pff. Elle ne m’a même pas regardée une seconde.
- C’est qui, elle? demandé-je dédaigneusement.
- Une fille avec qui je suis allée au secondaire. Bon, allons-y.
- Laisse faire. Je n’en veux pas. On peut aller à la caisse.
Maman est sceptique devant mon refus. Elle remarque alors le congélateur à côté de nous. Sans prévenir, elle ouvre la porte et saisit un pot de sorbet.
- Je sais que tu adores, les sorbets à la framboise, s’explique-t-elle en le déposant dans le panier.
- Il n’est même pas en spécial, dis-je tentant de l’en dissuader.
- Je m’en fous, poussin. Plus tard, tu seras contente d’en avoir.
Sur ce, elle se retourne et se dirige vers les caisses.
À la maison, on savoure nos bowls pokés dans le salon en écoutant Le journal de Bridget Jones, notre film de « fille » préféré. On le connaît par cœur. C’est notre film fétiche mère-fille. Je sais que ma mère a un faible pour Mark Darcy, le grand amour de Bridget. Ce n’est pas comme si elle trompait mon père. Il est d'ailleurs bien au courant. Lui-même, il a le béguin pour la princesse Leia. C’est commun dans la famille de tomber amoureux de personnages de fiction. Mon grand amour à moi c’est Jim Hawkins dans La planète au trésor. Oui, je suis amoureuse d’un dessin animé, et je l’assume complètement. Maverick c’est Mary-Jane dans Spiderman et Daniel c’est Eleven dans Stranger Things. Ça me refait penser à ma discussion avec Nadia l’autre fois. Et si Daniel était dans le monde à l'envers? C’est bien peu probable mais ça expliquerait pourquoi on n’a aucun indice sur ce qui lui est arrivé. Il faudrait qu’Eleven débarque chez nous, et qu’elle nous aide à le retrouver. Daniel serait sous le charme total de savoir qu’il a été retrouvé grâce à elle. Cette idée me tire un sourire.
Ma mère pleure comme un bébé à la fin du film lorsque Mark achète un nouveau journal à Bridget. Je comprends que c’est émouvant mais quand même. C’est un peu trop émotif comme réaction. En même temps, avec tout ce qui se passe, elle est très à fleur de peau alors un rien peut la faire pleurer. Ce qui n’est pas une mauvaise chose tout compte fait. C’est essentiel de laisser aller ses émotions. Ce n’est pas bon de les garder à l’intérieur. Mon père devrait suivre cet exemple.
- Il n’est même pas en spécial, dis-je tentant de l’en dissuader.
- Je m’en fous, poussin. Plus tard, tu seras contente d’en avoir.
Sur ce, elle se retourne et se dirige vers les caisses.
À la maison, on savoure nos bowls pokés dans le salon en écoutant Le journal de Bridget Jones, notre film de « fille » préféré. On le connaît par cœur. C’est notre film fétiche mère-fille. Je sais que ma mère a un faible pour Mark Darcy, le grand amour de Bridget. Ce n’est pas comme si elle trompait mon père. Il est d'ailleurs bien au courant. Lui-même, il a le béguin pour la princesse Leia. C’est commun dans la famille de tomber amoureux de personnages de fiction. Mon grand amour à moi c’est Jim Hawkins dans La planète au trésor. Oui, je suis amoureuse d’un dessin animé, et je l’assume complètement. Maverick c’est Mary-Jane dans Spiderman et Daniel c’est Eleven dans Stranger Things. Ça me refait penser à ma discussion avec Nadia l’autre fois. Et si Daniel était dans le monde à l'envers? C’est bien peu probable mais ça expliquerait pourquoi on n’a aucun indice sur ce qui lui est arrivé. Il faudrait qu’Eleven débarque chez nous, et qu’elle nous aide à le retrouver. Daniel serait sous le charme total de savoir qu’il a été retrouvé grâce à elle. Cette idée me tire un sourire.
Ma mère pleure comme un bébé à la fin du film lorsque Mark achète un nouveau journal à Bridget. Je comprends que c’est émouvant mais quand même. C’est un peu trop émotif comme réaction. En même temps, avec tout ce qui se passe, elle est très à fleur de peau alors un rien peut la faire pleurer. Ce qui n’est pas une mauvaise chose tout compte fait. C’est essentiel de laisser aller ses émotions. Ce n’est pas bon de les garder à l’intérieur. Mon père devrait suivre cet exemple.
* * *
Il approche seize heures. Je n’ai pas été très productive aujourd'hui, et la rencontre de théâtre débute bientôt. Je ne sais pas si ma mère accepterait de m’y reconduire. Je n’ai pas été à l’école mais je ne veux pas manquer le théâtre.
- Maman?
- Oui, poussin?
- Est-ce que tu pourrais me reconduire à l’école?
- Pourquoi? L’école finit dans quelques minutes.
- Pour le théâtre.
- Tu te sens en forme pour y aller?
- Pour ça, oui.
- C’est sélectif, ton affaire, m’agace-t-elle.
- Le théâtre ça me fait du bien, expliqué-je. C’est thérapeutique et ça me permet de me rendre utile. L’école par contre, j’ai vraiment de la misère à m’y mettre.
- D’accord. Prépare-toi, je vais t’y conduire.
Je souris, satisfaite. Je vais préparer mon sac. J’ai hâte de continuer à monter le décor.
Maman me dépose devant l’école.
- Je reviens te chercher quand c’est fini, me dit-elle.
- D’accord, merci!
Je lui fais un câlin et sors de la voiture.
Aussitôt que j’entre dans l’école, la foule d’élèves qui sort des classes m’indique que les cours viennent juste de se terminer.
En me dirigeant vers le local de théâtre, je tombe sur Nicolas qui marche en sens inverse.
- Eille Liz!
- Pourquoi? L’école finit dans quelques minutes.
- Pour le théâtre.
- Tu te sens en forme pour y aller?
- Pour ça, oui.
- C’est sélectif, ton affaire, m’agace-t-elle.
- Le théâtre ça me fait du bien, expliqué-je. C’est thérapeutique et ça me permet de me rendre utile. L’école par contre, j’ai vraiment de la misère à m’y mettre.
- D’accord. Prépare-toi, je vais t’y conduire.
Je souris, satisfaite. Je vais préparer mon sac. J’ai hâte de continuer à monter le décor.
Maman me dépose devant l’école.
- Je reviens te chercher quand c’est fini, me dit-elle.
- D’accord, merci!
Je lui fais un câlin et sors de la voiture.
Aussitôt que j’entre dans l’école, la foule d’élèves qui sort des classes m’indique que les cours viennent juste de se terminer.
En me dirigeant vers le local de théâtre, je tombe sur Nicolas qui marche en sens inverse.
- Eille Liz!
Il m'accoste avec un peu trop d'enthousiasme pour ne pas que je trouve ça louche. Je regarde derrière moi au cas où il se serait adressé à quelqu’un d’autre. Mais il m’a appelé Liz… Je suis vraiment idiote.
- Liz. Je sais pas ce que tu as fait, mais Charlie me fout la paix maintenant.
- Quoi?
C’est génial! Mais je ne sais pas moi-même ce que j’ai bien pu faire pour qu’elle arrête ses conneries.
- C’est vrai! confirme-t-il. Je l’ai vue hier et elle m’a à peine regardé. Ben, elle m’a quand même lancé un regard un peu méprisant mais elle est passée à côté de moi sans rien dire. Et aujourd'hui, c’était pareil.
- Wow Nicolas! Je suis vraiment contente pour toi.
- T’as fait quelque chose, hein?
- Bah, je suis allée lui parler, admeté-je un peu gênée. Et j'avoue que je n’ai pas été très délicate, mais j’étais certaine que ça n’avait eu aucun impact.
Charlie était tellement arrogante. Je n’aurais pas pensé avoir un effet sur elle. C’est à croire qu’elle est plus peureuse qu'elle le prétend, sous ses airs de dure à cuire.
- En tout cas, merci.
Il repart derrière moi. Pressé mais heureux. Il a un bus à prendre. Moi, j’ai une réunion de théâtre dans trente minutes.
Lorsque j’arrive devant la porte du local, je suis accueillie par les yeux de Nadia qui s’écarquillent en me voyant.
- Liz! s’exclame-t-elle joyeusement. Qu’est-ce que tu fais ici?
- Liz. Je sais pas ce que tu as fait, mais Charlie me fout la paix maintenant.
- Quoi?
C’est génial! Mais je ne sais pas moi-même ce que j’ai bien pu faire pour qu’elle arrête ses conneries.
- C’est vrai! confirme-t-il. Je l’ai vue hier et elle m’a à peine regardé. Ben, elle m’a quand même lancé un regard un peu méprisant mais elle est passée à côté de moi sans rien dire. Et aujourd'hui, c’était pareil.
- Wow Nicolas! Je suis vraiment contente pour toi.
- T’as fait quelque chose, hein?
- Bah, je suis allée lui parler, admeté-je un peu gênée. Et j'avoue que je n’ai pas été très délicate, mais j’étais certaine que ça n’avait eu aucun impact.
Charlie était tellement arrogante. Je n’aurais pas pensé avoir un effet sur elle. C’est à croire qu’elle est plus peureuse qu'elle le prétend, sous ses airs de dure à cuire.
- En tout cas, merci.
Il repart derrière moi. Pressé mais heureux. Il a un bus à prendre. Moi, j’ai une réunion de théâtre dans trente minutes.
Lorsque j’arrive devant la porte du local, je suis accueillie par les yeux de Nadia qui s’écarquillent en me voyant.
- Liz! s’exclame-t-elle joyeusement. Qu’est-ce que tu fais ici?
- Je ne voulais pas manquer le théâtre.
- C’est génial! ajoute Luka. On est contents que tu sois là.
Attendrie par ces douces paroles, je lui saute dans les bras.
- C’est génial! ajoute Luka. On est contents que tu sois là.
Attendrie par ces douces paroles, je lui saute dans les bras.
* * *
J'adore passer le rouleau de peinture. Je trouve cette action tellement satisfaisante. Ça arrive à m'apaiser. Les murs de bois qui contournent la scène deviennent noirs à mesure que je passe le rouleau. À côté de moi, Nadia et Luka fabriquent une fenêtre de bois qui sera posée sur le mur à droite. Quand la peinture sera terminée et sèche, bien sûr. À la table, Chloé cherche sur son ordinateur portable des bruitages et de la musique qui conviendraient à notre pièce de théâtre.
- Pour la scène où Pauline joue au piano, elle pourrait jouer l’instrumental de Mistral gagnant, nous propose-t-elle la tête toujours rivée sur son écran. Qu’est-ce que vous en dites?
- Ça serait beau mais ça ferait anachronique, dis-je en reposant mon rouleau. Cette chanson est sortie dans les années 1980, non? Et la pièce se déroule dans les années 1970.
- Ah oui, c’est vrai, se désole-t-elle. Merde alors. En connaissez-vous des chansons à piano de cette époque?
- Continue de chercher sur google, conseille Luka. Je ne connais pas de chansons de cette époque là.
- Ben, il y a plein de chansons de Queen, lance Nadia, le marteau dans les mains. Luka, tu ne vas pas me dire que tu ne connais pas Queen!
- J’avoue, concède-t-il en riant. Mais je ne connais pas vraiment leurs chansons.
- C’est une bonne idée, Nadia, approuvé-je. Love of My Life, ça pourrait marcher, je crois.
- Oui! s'extasie Nadia. Elle est magnifique cette chanson et elle collerait vraiment avec la scène. Douce, à la fois romantique et mélancolique. Ça va parfaitement avec Pauline et Bernard.
- Okay cool, accepte Chloé. Je vais aller écouter ça.
Aussitôt dit, Chloé fait jouer la chanson de son ordinateur. Nadia affiche un air béat en écoutant cette magnifique pièce. Moi, je me mets à me sentir nostalgique. Quand nous étions petits, Daniel et moi adorions cette chanson. On ne comprenait pas les paroles, mais on la trouvait tellement belle. On demandait souvent à papa de la faire jouer sur la radio du salon. Maverick était tellement tanné de l’entendre, mais on s’en foutait. On voulait l’écouter à notre guise. J’en ai un pincement au cœur à l’idée que ce soir, je ne pourrai pas annoncer à Dan que notre chanson d’enfance se retrouvera dans la pièce de l’école. J'entretiens tout de même le faible espoir que mon petit frère reviendra bientôt et qu’il pourra assister à la pièce. Je ravale mes larmes avant que quelqu'un ne remarque mon malaise.
- C’est vrai, elle est super belle, déclare Chloé, une fois la chanson terminée. On y va avec ça. Donc, à la scène 8, Pauline jouera l'instrumental de Love of My Life.
- Super! approuve Nadia.
* * *
Ce soir, toute seule dans mon lit, j’écoute Love of My Life, les écouteurs dans mes oreilles. Non seulement cette chanson me rappelle de bons souvenirs d’enfance avec Dan, mais j’ai l’impression qu’elle reflète assez bien comment je me sens, ces temps-ci. Cette chanson parle d’une personne blessée par le départ de l’amour de sa vie, qu’elle aimerait revoir revenir à la maison. Le passage où Freddie Mercury chante « Back, hurry back, Please, bring it back home to me » vient particulièrement me chercher. Je souhaiterais plus que tout au monde que Daniel revienne à la maison. Pourrais-je dire que Daniel est le love of my life? Dans un sens, oui. L'amour de notre vie n'est pas nécessairement un amoureux ou une amoureuse. Les personnes que j'aime le plus au monde sont mes frères. Ce sont eux les amours de ma vie. D'ailleurs, il me semble que Freddie Mercury a écrit cette chanson pour sa meilleure amie.
En écoutant cette chanson, c’est comme si j'exprimais mon désarroi face au départ de mon frère, l’amour de ma vie, et que je lui demandais de revenir à la maison.
Je m’endors sur cette douce mélodie qui m’accompagne si bien dans ce moment difficile.
J' aimerais bien que l'on retrouve Daniel...combien de chapitres as -tu l' intention d' écrire?
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